Kate Stevenson et Barbara Gribling (dir.), Chivalry and the Medieval Past, coll. Medievalism, vol. 7, Boydell and Brewer, 2016.
One of the most difficult and complex ethical and cultural codes to define, chivalry has proved a flexible, ever-changing phenomenon, constantly adapted in the hands of medieval knights, Renaissance princes, early modern antiquarians, Enlightenment scholars, modern civic authorities, authors, historians and re-enactors. This book explores the rich variations in how the Middle Ages were conceptualised and historicised to illuminate the plurality of uses of the past. Using chivalry as a lens through which to examine concepts and uses of the medieval, it provides a critical assessment of the ways in which medieval chivalry became a shorthand to express contemporary ideals, powerfully demonstrating the ways in which history could be appropriated. The chapters combine attention to documentary evidence with what material culture can tell us, in particular using the built environment and the landscape as sources to understand how the medieval past was renegotiated. With contributions spanning diverse geographic regions and periods, it redraws current chronological boundaries by considering medievalism from the late Middle Ages to the present.
Table des matières
Introduction: Chivalry and the Medieval Past – Katie Stevenson and Barbara Gribling
‘An Institution Quite Misunderstood’: Chivalry and Sentimentalism in the Late Scottish Enlightenment – David W. Allan
Creating a ‘Medieval Past’ for the Swedish Orders of Knighthood – Antti Matikkala
‘Hung Round with the Helmets, Breast-Plates, and Swords of our Ancestors’: Allusions to Chivalry in Eighteenth-Century Gothicism – Peter N. Lindfield
Knights on the Town? Commercial and Civic Chivalry in Victorian Manchester – Rosemary A. Mitchell
‘The Dark Side of Chivalry’: Victory, Violence and the Victorians – Barbara Gribling
Daze and Knights: Anachronism, Duelling and the Chivalric Ethic in Nineteenth-Century Italy – Steven C. Hughes
The German Crusade: The Battles of Tannenberg, 1410 and 1914 – Stefan Goebel
‘Hark ye back to the age of valour’: Re-enacting Chivalry from the Eglinton Tournament to Kill Streak – Paul Pickering
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L’ouvrage étudie le médiévalisme au prisme du thème de la chevalerie, pensé à la fois dans son rapport intrinsèque à la période médiévale et en tant que notion fluctuante au fil des siècles. La chevalerie convoque tout un imaginaire temporel, qui selon les directrices d’ouvrage Kate Stevenson et Barbara Gribling est toujours un imaginaire du passé : même au Moyen Âge, le principe de la chevalerie s’appuie sur un passé mythique, en grande partie (ré)inventé, et selon un processus qui perdure jusqu’à aujourd’hui. Il s’agit par ailleurs d’une notion vectrice de valeurs morales et éthiques, pensées pour réguler les comportements de l’élite ; cependant, ces valeurs se transforment au fil des siècles, comme le montrent bien les différents articles regroupés ici. L’idée de chevalerie renvoie à une éthique militaire lors de la période médiévale, et ponctuellement depuis, mais devient aussi un synonyme de civilisation à la Renaissance, de responsabilité impériale à l’époque victorienne, voire revêt des connotations genrées ou queer dans notre contemporanéité post-féministe – un aspect toutefois moins développé dans l’étude. Les contributions regroupées par Kate Stevenson et Barbara Gribling visent donc à étudier cette chevalerie aux multiples facettes, afin de l’interroger dans une perspective diachronique et transnationale : les différents articles abordent l’évolution de cette notion au Royaume-Uni, avec des approches plus spécifiques sur l’Angleterre – voire dans la seule ville de Manchester pour l’article de Rosemary Mitchell – et l’Écosse, notamment, mais aussi en Suède, Italie et Allemagne – avec des déplacements plus ponctuels vers l’Australie et les États-Unis. La focalisation première sur l’Europe occidentale permet un premier élargissement géographique des perspectives soulevées, tout en proposant une étude thématique assez unifiée ; de fait, l’essentiel de la réflexion tourne malgré tout autour du Royaume-Uni.
Le volume débute en toute logique par une introduction de Kate Stevenson et Barbara Gribling, présentant le rapport de la chevalerie au passé – et plus spécifiquement au passé médiéval, qui constitue le fil directeur de l’analyse. Il est à noter que ce texte, tout comme la suite de l’ouvrage, ne cherche pas véritablement à définir ce qu’est la chevalerie, mais propose surtout d’interroger l’association permanente entre les notions de « chevalerie » et de « passé médiéval », et le fait qu’il s’agisse donc d’une construction notionnelle et mouvante.
L’un des intérêts principaux de l’ouvrage, au-delà de sa thématique ciblée permettant un regard diachronique tout à fait pertinent, est d’associer des études littéraires à des perspectives historiographiques, comme dans l’article de David Allan, et à des analyses de la culture visuelle et matérielle : l’introduction débute d’ailleurs par l’évocation du bal costumé médiévaliste de la reine Victoria au printemps 1842, où le couple royal – illustré en couverture d’après le tableau de Edwin Landseer – prend les atours de Philippa de Hainaut et Edward III. L’ouvrage cherche systématiquement à porter l’étude au-delà de la littérature – sans bien entendu y renoncer –, en puisant dans les sources matérielles : l’article de Peter N. Lindfield sur le gothique du XVIIIe siècle, et celui de Steven C. Hugues sur les pratiques de duel dans l’Italie du XIXe siècle sont à ce sujet éloquents, de même que l’approche richement illustrée de la reconstitution chevaleresque (mais peut-être un peu rapide vue l’ampleur du sujet) proposée par Paul Pickering dans le chapitre final. Dans cette perspective, l’ouvrage inclut d’ailleurs de nombreuses illustrations, dont plusieurs en couleur, ce qui constitue un réel plus dans l’argumentation développée.
Les huit articles qui composent l’étude adoptent une progression surtout chronologique, au risque parfois de simplement juxtaposer les analyses sans transition précise : le volume ne propose pas de regroupement en parties, d’introductions intermédiaires ou de conclusion qui permettrait de prendre du recul sur les grandes lignes directrices de l’argumentation. L’index final rappelle bien d’ailleurs cette ampleur des sujets évoqués mais les croisements finalement réduits entre les différents articles. Le rapport au médiévalisme de l’époque victorienne demeure central dans la plupart des contributions, soulignant s’il en était besoin l’influence décisive du XIXe siècle à la fois sur le médiévalisme occidental et sur l’évolution de la notion de chevalerie. Il s’agit véritablement du pivot du livre, avec les deux études proposées par Rosemary Mitchell et Barbara Gribling sur les spécificités de l’ère victorienne. De même, l’on note en filigrane une réflexion pour ainsi dire commune sur le rapport à la « véracité historique » : de nombreux articles interrogent les enjeux et surtout les limites de cette revendication à la fois matérielle et scientifique. Dans son étude sur les ordres de chevalerie suédois du milieu du XVIIIe siècle, Antti Matikkala montre bien par exemple le rôle des antiquaires et historiens dans la (re)création de la notion de chevalerie et des valeurs qui lui sont associées.
Malgré une approche parfois éparse, la focalisation sur le thème de la chevalerie permet de maintenir une forme d’unité dans la réflexion développée ici. L’ensemble des articles propose de lire le médiévalisme comme « un outil pour comprendre le présent » – une expression qui revient à plusieurs reprises – à travers cet exemple spécifique et très malléable de la chevalerie. Tout au long de l’ouvrage, cet aspect est surtout étudié au travers des vecteurs culturels, même si les parallèles avec l’histoire politique ne sont jamais négligés – en particulier dans la problématique fort intéressante de l’article de Stefan Goebel sur les parallèles entre les deux batailles de Tannenberg, en 1410 et 1914, article qui ouvre une réflexion plus large sur les usages germaniques de la chevalerie médiévale. La question des nationalismes constitue de fait une autre thématique récurrente de l’ouvrage, qu’une conclusion finale aurait sûrement pu valoriser davantage.
De façon intéressante, l’ouvrage revient avec beaucoup de nuance sur l’ambivalence de la notion de chevalerie, lorsqu’elle est utilisée pour mettre le passé au service du présent : elle convoque des imaginaires glorieux mais aussi des dimensions négatives, qu’il est parfois complexe de démêler et qui se superposent régulièrement selon les périodes.
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Justine Breton (10 avril 2025). Parution : Chivalry and the Medieval Past. Modernités médiévales. Consulté le 12 mai 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/13q1z